Sakura, sakura, des fleurs comme s’il en pleuvait – Expats au Japon depuis 182 jours
Sakura, sakura, des fleurs comme s’il en pleuvait
D’abord l’ambiance musicale. Mais si, vous la connaissez ! La musique de la publicité pour « Obao fraîcheur sèche », quand la femme qui a nourri nos mâles émois pré-pubères sortait de son super jacuzzi et se pschittait avec son déo laissant apercevoir son sein gauche avant d’enfiler son kimono. Oui, celle-là, vous y êtes ! Eh bien, c’est la chanson la plus célèbre au Japon (rien à voir avec le déo !), et ce n’est pas un hasard si elle évoque une des coutumes les plus importantes ici : la promenade sous les cerisiers en fleurs, « hanami », littéralement « voir les fleurs ».
Pas regardant, nos amis nippons, ils pardonnent bien volontiers à leur arbre préféré de ne donner aucun fruit : c’est une espèce spéciale de cerisiers qui croulent sous les fleurs en avril puis s’endorment le reste de l’année (wikipedia ou google vous aideront à trouver le nom latin, et la partition de la chanson pour ceux que mon allusion déodorante a laissé de marbre).
« Cerisiers, cerisiers, sur les pentes et dans la prairie, tu embaumes et tu embellis. Sur la brume légère brille le soleil du matin, fleurissez pour nous ». Raté ! La semaine a été belle et chaude, du jour au lendemain les centaines de cerisiers de Tokyo se chargent de mille fleurs en l’espace de deux jours. Le week-end s’annonce animé : l’on prépare les moches bâches bleues sur lesquelles l’on pique-niquera dans les parcs sous les frondaisons blanches ; on me dit que certains collègues s’organisent : l’un part en éclaireur en milieu d’après-midi (seule dérogation au travail forcené, on comprend l’importance de la chose) pour réserver le meilleur spot, et s’ensuivent des libations alcoolisées d’anthologie paraît-il durant le « yozakura », l’admiration des cerisiers en nocturne. Las ! Le ciel se couvre méchamment dimanche matin. Nous enfourchons nos vélos au plus vite pour profiter de la fête avant la pluie. Il fait bien frisquet, et les photos manquent de relief sous ce ciel bas et lourd. Mais qu’importe ! Près du palais impérial, les lourds cerisiers se penchent sur chaque rive des immenses douves, pour se mirer dans l’eau ou pour que leurs frondaisons neigeuses se frôlent au-dessus des canotiers du dimanche.
Incroyable ! La file d’attente que nous prenions pour celle des apprentis-rameurs (et donc que nous dépassons allègrement en bons Français qui se respectent) est juste celle des promeneurs qui veulent emprunter le sentier sous les "sakuras", une petite portion du tour de l’immense enceinte fortifiée, longue de plusieurs kilomètres. Ce n’est pas une file d’attente, c’est une randonnée au ralenti, une lente pérégrination pour observer l’éphémère, l’insaisissable. Ils sont là pour essayer de le capter avec l’objectif approximatif de leur téléphone mobile multifonctions. Ils sont juste là pour admirer le symbole, très ancien, très ancré, déjà admiré par les samurais (et paraît-il également par les kamikazes de la dernière guerre), de la petite fleur blanche qui va bientôt se détacher et s’envoler avant même de faner.
Libellés : Culture et traditions, Tokyo
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